Supporters Sochaliens : et maintenant, on fait quoi ? (31/05/18)


« Face aux périls qui menacent directement leur existence, ceux qui tentent de s’accommoder aux sévères exigences des autorités perdent au fil du temps leurs caractéristiques intrinsèques et renoncent à l’essence même de leur mouvement, à savoir leur autonomie et leur culture spécifique. Cette institutionnalisation éloigne les éléments les plus turbulents qui ne s’identifient pas à cette conception. Car les ultras sont toujours en recherche d’un équilibre impossible, celui d’être reconnu pour leur engagement, leurs activités de soutien, leur implication dans le social, leur idée généreuse et désuète – dans une époque vouée à l’intérêt financier – de s’investir intégralement dans ces collectifs autogérés, tout en maintenant intacte la radicalité qui les anime et qui les pousse encore et toujours à tenter de se confronter physiquement.
[…] La dimension créatrice, le lien social et l’esprit de solidarité sont des points cardinaux de ces groupes. Dans des sociétés de plus en plus individualistes et en perte de repères, les ultras offrent encore ces possibilités. »


Sébastien Louis, Ultras, les autres protagonistes du football, Paris, Mare & Martin, 2017, p. 327-328.


Une saison en enfer ?
Entre autres, oui, mais pas que. Décryptage…
Jeudi 31 mai, à mi-chemin entre deux événements ayant un commun point d’orgue – le football, en l’occurrence – mais à des années lumières l’un de l’autre. En effet, il y a une semaine et demi, la Direction Nationale du Contrôle de Gestion (DNCG), – en bon gendarme qui se respecte, par un graissage de patte peut-être ? – a une énième fois validé l’avenir du FCSM lors de son audition. Énième avertissement, énième menace effacée avec quelques millions venant boucher une énième faille qui, petit à petit, deviendra un gouffre qu’il ne sera plus possible de combler. L’autorité qui fait peur puis qui finalement arrondie les angles ouvre la porte à toujours plus de dérives. Preuve à l’appui dans notre cas précis – et nous ne sommes pas au bout de nos peines. C’est l’ère du football moderne dans toute sa splendeur ; nous subissons, forcés sans doute à vivre une contradiction pour garder près de nous une passion qui nous est chère et qui, à la base, était bien plus innocente. Mais pour combien de temps encore ?
Et puis, dans une semaine et demi, se tiendra la première assemblée générale de notre groupe. En bon comité directif qui se respecte, nous avons décidé de faire les choses correctement : lieu atypique, programme relativement riche, organisation millimétrée, pour quelques heures de nombrilisme bien méritées après une saison en enfer – à l’instar, et pour d’autres raisons bien sûr, d’un autre grand révolté du XIXe siècle dont notre fougueuse jeunesse s’inspire inconsciemment. Une saison à maintenir actif, avec bon nombres d’autres supporters Sochaliens, le brasier brûlant et résistant d’une contestation dont nous ne pouvons encore voir la fin tant, il faut l’avouer, l’adversaire résiste, sans doute bien aidé par d’autres éléments en tous genres mais dont nous ignorons encore l’identité. Les masques tomberont, un jour. Quoi qu’il en soit, cette lutte est légitime et se stopper maintenant serait un peu mimer et reproduire les faits et gestes de ces grands clubs actuels du foot-business qui vous promettent monts et merveilles et qui finalement échouent très rapidement. Alors oui, dépenser du temps, de la motivation, de la créativité et de l’argent dans cette lutte est épuisant, usant, rongeant. Mais qui croit encore qu’un combat – fort honorable et on ne peut plus légitime pour le peuple Jaune & Bleu, qui est plus est ! – est facile et aisé à remporter ? À tous ceux qui se sentent à bout : ce n’est pas le moment de lâcher. La cause supporter finira par vaincre et ressortira de tout cela encore plus forte.
Car, oui, quatre ans après la descente en deuxième division et trois ans et demi après l’arrivée de la mascarade Ledus, le supportérisme Sochalien ne s’est jamais aussi bien porté que durant ces deux dernières années. Paradoxe ou union logique ? Tous soudés dans la galère pour une cause commune ? Oui, sans doute, mais il y a plus que cela. Avec un brin de recul, nous pouvons d’ores et déjà affirmer que l’ère Ledus aura façonné un changement dans ce supportérisme Sochalien. Loin de nous l’idée de remercier ces mercenaires, bien sûr !, mais nous voulons dire par-là que quoi qu’il arrive, il est certain que notre mouvance a grandi ces derniers temps et sera encore différente ces prochaines années. En ce sens que deux notions ont été assimilées et sont désormais mises à exploitation : l’existence possible – personnelle et collective dans le même temps – du supporter Sochalien et de nos organisations, et le rôle authentique et honorable à jouer, à contre-courant des tendances de l’époque, par le biais aussi bien de ce qu’incarne et propose le supportérisme Sochalien dans son ensemble et/ou via notre propre groupe. Le FCSM meurt dans une absurdité à peine croyable car explicite, sous nos yeux ; tandis que les supporters s’enrichissent d’une éthique de plus en plus forte dans leur combat de sauvetage, d’assistance à personne en danger. Un rayon de soleil jaune bouton d’or dans un ciel bleu roi, hélas depuis bien longtemps obscurci par un orage venu de l’Est…


2015


Des réactions tout en tension face à ce passage à tabac
Qu’importent les moyens, qu’importe l’entité responsable, qu’importent les réactions : tout ce qui peut saboter l’entreprise « FCLedus-BaskoniaSM » doit être réalisé, mis en œuvre, effectué et salué dignement, du simple tract revendicatif à l’action coup-de-poing. La vérité doit passer par l’outrage pour être entendue ? Mettons du cœur à l’outrage. L’union des supporters Sochaliens est remarquable, puisse qu’elle perdure le plus longtemps possible – et cela ne tient qu’à nous. Les actions minimes comme les actions plus extrêmes de notre groupe et des autres organisations jusqu’aux projets de Sochaux United et de SocioChaux sont concrètes : elles visent le vif du sujet et se font dans le vif du sujet. Elles n’y vont pas par quatre chemins. Tous ceux qui prétendent vouloir sauver notre club peuvent en prendre de la graine et agir à leur tour, avec nous.
Le football français, les médias, les politiques n’ont pas l’air très concerné et/ou ne semblent pas mesurer la gravité de la situation, à quelques exceptions près bien sûr. Qu’est-ce qui se trame derrière l’alliance de Ledus et Baskonia pour qu’il y ai une telle obstination de leur part ? Mystère pour le moment, d’autant plus que les quelques scandales révélés notamment par la presse cette saison parviennent à alarmer sur l’instant, puis tout repart à la trappe. C’est, sans langue de bois, sans doute le grand pouvoir primeur sur l’humain de l’intérêt financier en France. Aussi, bien que ce soit leur gagne-pain, pourquoi les salariés et les joueurs du FCSM ne tirent pas une sonnette d’alarme quant à tout ce qui se trame au-dessus d’eux ? Personne ne peut ignorer de telles affaires. Là aussi, le financier prend le pas sur l’humain. Pourtant, des signaux de détresse ou d’interpellations de l’avis public sont possibles et le droit de grève pour se faire remarquer est encore, comme son nom l’indique, un droit – et sans doute un devoir ! – fondamental de nos jours. Le manque de prise de responsabilité des salariés du FCSM, sous l’égide de la peur du patron sans doute – une peur légitime ou non, chacun aura son avis –, est regrettable. Quoique le faux triangle amoureux formé cette année est à saluer considérablement et tant il fût appréciable : la relation supporters-salariés a permis de faire de grandes choses, de réaliser de beaux projets, sous les yeux ou sous l’ignorance du grand patron.
Alors, dans un élan de nombrilisme légitime en cette intersaison, quoi penser ? C’est la fameuse question déterminante et si préoccupante qui revient sans cesse et à juste titre : le club ou le groupe ? Dans notre cas précis, le groupe, qui, tant qu’il aura des personnes motivées en ses rangs pour le faire vivre, vivra. Autant dire qu’il n’est pas prêt de mourir. Oublions l’extra-sportif le temps d’une ou deux phrases : notre horizon à venir est riche, beau et prometteur. C’est toute la diversité en provenance de chacun, au cas par cas, qui constitue le groupe, qui motive et stimule de si beaux jours, événements, actions, voyages à venir. Les projets ne manquent pas et vont se réaliser chacun leur tour. Néanmoins, après une telle année, une fin de saison si difficile car souvent pris de court, une posture claire quant à notre attitude la saison prochaine va devoir sortir du lot des propositions et être adoptée face à la mascarade menée à ciel ouvert que nous subissons. L’avis global semble osciller entre deux éventuelles tenues : le boycott du stade de football tant que le « FCLedus-BaskoniaSM » sera aux commandes, ou le réinvestissement de notre terrain d’exploitation originel. Ces deux postures s’adoptent bien entendu sous le signe d’une hostilité totale à Ledus et d’une vigilance accrue à Baskonia. Et, qu’importe la posture adoptée, nous nous devons de rester ensemble. Si notre culture existe encore et évolue, que ce soit dans le monde entier comme à Sochaux, c’est grâce à la présence et à l’investissement et à la richesse et à la fécondité du rapport de soi avec l’Autre. La rupture, la désunion et le personnalisme sont trois notions lointaines que nous devons garder à distance et ce quoi qu’il arrive. Notre force d’existence et d’action réside en fait dans ce qu’une entreprise comme le « FCLedus-BaskoniaSM » n’a pas – à savoir ce pouvoir d’union, de confiance et d’humanité.

2016

Pour une éthique, une morale et un respect de notre Institution !
Le FCSM, ses têtes pensantes et ceux qui pointent du doigt nos actions, c’est-à-dire l’échelle locale, mais aussi l’État et ses (sous-)dérivés, c’est-à-dire l’échelle nationale, ainsi que les médias et tous ceux qui peuvent émettre un jugement lorsqu’ils se doivent d’être neutre ou qu’ils n’ont aucun légitimité à l’émettre, mêlent et confondent de manière hasardeuse deux notions : celle du droit et celle de la morale. A l’heure où tout est calculé pour orienter, ne tombons pas dans ces pièges qui cherchent à diviser. Sachons prendre un pas de recul pour mieux diriger les deux prochains. Plus clairement, tapons sur le degré de violence morale exercée par les propriétaires actuels sur toute notre Institution plutôt que sur quelques fumigènes jetés sur une pelouse pour dénoncer cela. Cependant, nous sommes tous d’accord qu’un problème persiste : après quatre-vingt-dix ans de glorieuse existence, qui se reconnaît aujourd’hui dans ce FCSM ? Plus personne. Mais rien n’est jamais définitif…
Moisir en deuxième division n’a pas – ou plus ? – vraiment d’importance pour nous. Ce qui nous évite, entre autres et par exemple, d’endurer les propos infectes et soi-disant savants d’un Pierre Ménès le dimanche soir. L’éthique du FCSM – c’est-à-dire ce qu’il dégage, comment il est géré, qu’est-ce qu’il souhaite faire – est devenue plus importante. L’extra-sportif prime désormais, et ce sont justement les supporters Sochaliens en lutte contre les problèmes actuels qui peuvent se targuer de montrer la voie à suivre : celle de la transparence, celle d’un attachement à des valeurs humaines et surtout celle d’une omniprésence de la vérité, du respect et de l’authenticité. Tout cela aurait pu être mis en œuvre par une rétrogradation dans les divisions inférieures du football français, ce qui aurait permis un départ forcé de ceux qui orchestrent la lente agonie de notre FCSM en toute quiétude, mais les instances sportives en ont décidé autrement à l’heure où l’on condamne des supporters pour des faits mineurs plutôt que des escroqueries en évolution et en libre articulation sous le nez et la barbe de tous. Car oui, ne nous laissons pas berner : pourquoi Ledus s’obstine à ce point ? Pourquoi Baskonia essaye de nous faire croire qu’il vient seulement jouer au super-héros, au sauveur sportif ? Ne nous faisons pas avoir : malgré le bon curriculum vitae du groupe espagnol, celui-ci ne vient pas par pur charité et, qui plus est, ne vient pas prendre la place du groupe chinois mais vient plutôt s’allier à lui, ce qui justifie notre absence de dialogue avec eux.
Bon nombre de groupes ultras, en Italie, accrochent une grande banderole dans leur tribune comportant un message éloquent : « a modo nostro ». Il y a sans doute quelque chose à tirer de cela, ou tout du moins à creuser, à exploiter. L’heure ne serait-elle pas à une action en deux temps pour nous, supporters ? À savoir l’animation de notre tribune et de la vie de notre groupe d’une part, et la poursuite d’un combat que nous avons entamé et dont il faut aller jusqu’au bout par respect pour nous-même d’autre part. Cette dualité telle une double posture dont la symbolique peut s’élargir : la revendication et la réalisation d’une vie de groupe tout en luttant contre les dérives modernes exécrables que nos valeurs nous poussent légitimement à nous insurger face à elles.

2017
Ledus-Baskonia, persona non grata  !


L’Enfant